Un, deux, trois nous irons au bois
Un.
Deux.
Trois.
Un, deux, trois, grosse comme un pti’ pois
Un, deux, trois, moi je n’en veux pas
Un, deux, trois, on ne s’inquiète pas …
Ces petites comptines de maternelle me reviennent, rimées, scandées, entêtantes, irritantes.
Le week-end passe, lent, indolent, insolent.
A certains moments j’oublierais presque. Un week-end ordinaire. Mais le pansement à changer est bien là pour me ramener à la réalité. Même pas mal, j’ai juste un sein couleur arc-en-ciel, c’est beau un arc-en-ciel, ça ne peut donc pas être si grave ?
A d’autres moments je me prends à vraiment espérer que ce sera bénin. Je voudrais bien être capable de formuler un vœu, un souhait, une prière, mais comment ? Et à qui ? Et puis de toute façon c’est inutile, les dés sont jetés, les éprouvettes vont parler. Faites vos jeux, les jeux sont faits, rien ne va plus … comment ça rien ne va plus ? C’est trop tard pour retirer ma mise ?
Dans les pires moments je me demande si je vais avoir droit à la panoplie complète. Si je vais avoir la force, la volonté d’y faire face. La maladie m’a toujours fait plus peur que la mort. La lente déchéance, la faiblesse, la douleur, l’atteinte à l’intégrité physique, la dépendance, la perte de la dignité. Je ne supporterais pas d’infliger ces images à ceux qui m’entourent.
Il y a des moments où je me demande pourquoi moi.
Et des moments où je me dis et pourquoi pas moi. Une femme sur huit. J’en connais au moins sept qui n’ont pas de cancer du sein.
Je sais à quoi m’attendre au pire. Et j’attends, mais pas forcément le pire. Mais le pire c’est d’attendre.